Wakâ Mne – Initiative Science et culture de la Nation sioux des Nakota d’Alexis

Qu’est-ce qui a changé?

Depuis des décennies, la Nation sioux des Nakota d’Alexis et ses quelque 2 200 membres, situés sur le territoire du Traité no 6, vivent sans accès à une eau potable sûre, propre et locale. Leur source locale d’approvisionnement en eau, le Wakâ Mne (God’s Lake), également connu sous le nom de Lac Sainte-Anne (Alberta), a subi une dégradation accélérée de la qualité de l’eau en raison des pressions exercées par les changements climatiques, l’agriculture industrielle, l’exploitation minière, la foresterie, l’urbanisation, les décharges illégales et les activités récréatives. Plus récemment, la Nation sioux des Nakota d’Alexis a commencé à pomper de l’eau traitée à Stony Plain, en Alberta (à 50 km de là) pour approvisionner les membres de la communauté en eau potable, ce qui représente un pas positif vers une communauté plus saine. D’autre part, l’acheminement de l’eau par canalisation sur près de 50 km représente également une solution « miracle » qui ignore fondamentalement les changements climatiques et la mauvaise utilisation systémique des ressources naturelles sur le territoire traditionnel de la Nation sioux des Nakota d’Alexis. Ces enjeux ont finalement amené la Nation à un point où elle ne peut plus subvenir à ses besoins ni pratiquer leur culture comme le promettait le Traité no 6 (28 août 1876).

Principes directeurs

La Nation sioux des Nakota d’Alexis s’efforce de vivre en harmonie et de respecter le Créateur et toutes les créations. La Nation s’engage à respecter les croyances de l’Isga et à utiliser toutes les ressources que le Créateur nous a accordées pour renforcer l’autonomie de notre peuple sur les plans spirituel, émotionnel, physique et mental. La dégradation de la qualité de l’eau sur notre territoire traditionnel est un symptôme de la pression humaine et des changements climatiques. Il est donc de notre responsabilité, en tant que protecteurs de la création, de mobiliser nos connaissances traditionnelles et nos compétences scientifiques occidentales pour forcer le changement dans les relations entre nations, les politiques et les attitudes du public au bénéfice de toutes les créations.

Description du projet

Notre initiative est la « Wakâ Mne – Initiative pour la science et la culture ». L’initiative a été fondée et est dirigée par le Dr Hughie Jones (membre de la Nation sioux des Nakota d’Alexis, doctorat en science des sols de l’Université de la Colombie-Britannique, 2019), qui a observé un manque de capacité au sein de sa communauté pour surveiller les processus environnementaux, le climat et les polluants environnementaux provenant de sources industrielles. Au début de 2019, le Dr Jones a obtenu un financement pluriannuel du Programme de surveillance du climat dans les collectivités autochtones (d’avril 2019 à mars 2022). Les objectifs de l’initiative sont les suivants :

  1. Surveiller le climat, la qualité de l’eau et les flux de gaz à effet de serre (c.-à-d. le dioxyde de carbone [CO2], le méthane [CH4] et la vapeur d’eau [H20]) du Wakâ Mne pour quantifier l’effet des changements climatiques et de la qualité de l’eau sur la « respiration » du Wakâ Mne (via les flux de GES).
  2. Documenter, archiver et transmettre le savoir traditionnel des Aînés et des détenteurs du savoir de la Nation sioux des Nakota d’Alexis en matière de dégradation et de changements climatiques et environnementaux afin de donner à la culture autochtone les moyens d’orienter les futures stratégies d’adaptation et d’atténuation.

Méthodologie — Science occidentale

L’initiative Wakâ Mne — Science et culture utilise diverses méthodologies pour surveiller en permanence le climat et l’environnement. La technique de surveillance la plus intéressante utilisée dans le cadre de l’initiative est sans doute la technique de covariance des turbulences.

Plus d’informations sur la covariance des turbulences

La covariance des turbulences (CT) permet aux humains de surveiller la façon dont les écosystèmes « respirent ». La CT est la norme mondiale utilisée par les biométéorologues pour surveiller en permanence les flux de gaz à l’échelle de l’écosystème (p. ex., CO2, CH4, oxyde nitreux [N20], H20) afin d’étudier les processus biogéochimiques au sein des écosystèmes. Par exemple, l’installation d’instruments de covariance des turbulences (CO2 et H20), de climat et de sol dans une forêt de peupliers faux-trembles (Populus tremuloidies) dans le nord de la Saskatchewan, pendant plusieurs décennies, a produit de nouveaux ensembles de données qui ont changé notre compréhension de la façon dont les bilans de carbone (photosynthèse et respiration) et d’eau (p. ex., évapotranspiration) du peuplier faux-tremble sont affectés par les changements climatiques (https://daac.ornl.gov/FLUXNET/guides/FLUXNET_Canada.html). La technique de la covariance des turbulences peut être utilisée dans les écosystèmes forestiers, agricoles, aquatiques (eau douce et de mer), humides, miniers, industriels et urbains (Black et al., 1996; Schrier-Uijl et al., 2011; Rock et al., 2017; Jones et al., 2017; Baldocchi et al., 2018).

Dans le cadre de l’initiative Wakâ Mne – Science et culture, nous utilisons la technique CT pour surveiller les flux de GES afin de comprendre 1) la photosynthèse et la respiration du lac, 2) la libération de méthane et 3) l’évaporation. Les ensembles de données produits dans le cadre de cette initiative nous aideront à 1) comprendre l’état actuel des ressources locales en eau dans l’Ouest canadien, 2) modéliser la façon dont les écosystèmes d’eau douce réagiront aux changements climatiques et à la pollution en amont et 3) documenter l’élaboration de politiques à l’échelle des bassins versants visant à préserver les ressources en eau dans l’Ouest canadien.

Méthodologie – Connaissances traditionnelles

L’initiative Wakâ Mne — Science et culture s’est attachée à documenter les perspectives, les opinions, les expériences et les connaissances des Aînés et des jeunes de la Nation sioux des Nakota d’Alexis au moyen d’entrevues de type balado. Pour réaliser des entrevues de grande qualité, Kateri Jones (membre de la Nation sioux des Nakota d’Alexis, responsable environnemental de la Nation sioux des Nakota d’Alexis et vidéographe) a consacré de nombreux mois à la création d’un studio mobile équipé d’un éclairage, de caméras vidéo, de microphones, de questions et de protocoles d’entrevue afin d’accroître constamment la capacité à documenter les perspectives autochtones. Puisque les voix autochtones sont mal ou sous-représentées dans la culture canadienne. L’initiative vise à diffuser des entrevues complètes sur les médias sociaux (p. ex., YouTube, Facebook, Instagram), à défendre les voix autochtones et à modifier le discours public sur la culture autochtone, les moyens de subsistance et la lutte imminente des peuples autochtones contre les changements climatiques et la dégradation de l’environnement. Parmi les sujets sur lesquels notre équipe s’est penchée lors des entrevues, on peut notamment citer :

  • Les pensionnats
  • L’accès aux systèmes alimentaires traditionnels
  • La dégradation de l’environnement
  • La culture (chant, cérémonie, communauté, nourriture et famille)
  • Les relations de nation à nation
  • Les changements climatiques
  • Le racisme
  • Les voies à suivre
  • L’histoire
  • La colonisation
  • L’agriculture
  • La langue

En plus des connaissances traditionnelles locales et de la collecte de données environnementales, l’équipe de l’initiative Wakâ Mne – Science et culture se passionne pour l’aide aux autres communautés des Premières nations, des Métis et des Inuits pour la mise en place et l’exploitation de stations de surveillance climatique indépendantes capables de soutenir la surveillance environnementale à long terme. Vous trouverez ci-dessous des liens vers des vidéos et de la documentation pour vous aider à planifier, concevoir et construire des stations de surveillance automatisées.

Ressources

Guides des stations climatiques

Réseaux, contacts professionnels et autres ressources

Eddy Covariance References

  • Variabilité interannuelle des flux nets et bruts de carbone écosystémique : un bilan (en anglais seulement : Baldocchi, D., Chu, H., Reichstein, M. (2018). Inter-annual variability of net and gross ecosystem carbon fluxes: A review. Agricultural and Forest Meteorology, 249, 520-533.)
  • Cycles annuels des flux de vapeur d’eau et de dioxyde de carbone dans et au-dessus d’une forêt boréale de trembles (en anglais seulement : Black, T.A., den Hartog, G., Neumann, H.H., Blanken, P.D., Yang, P.C., Russell, C., Nesic, Z., Lee, X., Chen, S.G., Staebler, R., Novak, M.D. (1996). Annual cycles of water vapour and carbon dioxide fluxes in and above a boreal aspen forest. Global Change Biology, 2, 219–229.)
  • Bilan hydrique, conductance de surface et efficacité d’utilisation de l’eau de deux jeunes plantations de peupliers hybrides dans la forêt-parc à trembles du Canada (en anglais seulement : Jones, H., Black, T., Jassal, R., Nesic, Z., Grant, N., Bhatti, J., Sidder, D. (2017). Water balance, surface conductance and water use efficiency of two young hybrid-poplar plantations in Canada’s aspen parkland. Agricultural and Forest Meteorology, 246, 256-271.)
  • Évaluation des niveaux de CO2 avant l’injection dans la zone de concession de séquestration de Quest (en anglais seulement : Rock, L., McNaughton, C., Black, A., Nesic, Z., Whiticar, M., Grant, N., Jassal, R., Lahvis, M., Davies, C., DeVaull, G., Shevalier, M., Nightingale, M., Mayer, B. (2017).  Assessment of CO2 levels prior to injection across the Quest Sequestration Lease Area. Energy Procedia, 114, 2836-2846.)
  • Rejet de CO₂ et CH₄ des lacs et des fossés de drainage dans les zones humides tempérées (en anglais seulement : Schrier-Uijl, A. P., Veraart, A. J., Leffelaar, P. A., Berendse, F., & Veenendaal, E. M. (2011). Release of CO₂ and CH₄ from lakes and drainage ditches in temperate wetlands. Biogeochemistry, 102(1/3), 265-279.)